
La peur est une émotion souvent redoutée, incomprise, voire niée. Elle est pourtant un signal fondamental de notre système de protection. Dans une perspective gestaltiste, la peur n'est ni un défaut de caractère, ni une faiblesse : c'est un mouvement de retrait ou d'arrêt, qui indique qu'un danger est perçu - réel ou symbolique.
Savoir écouter sa peur, c'est être en mesure de distinguer ce qui met en danger de ce qui appelle un ajustement. C'est aussi pouvoir se remettre en mouvement, quand le figement devient chronique.
La peur, émotion d'alerte et de mobilisation
La peur naît en présence d’un risque, d’un inconnu ou d’une menace perçue. Elle provoque une activation immédiate du corps : le rythme cardiaque s’accélère, les muscles se tendent, la respiration devient plus courte, l’attention se focalise. Ce mouvement physiologique prépare l’organisme à fuir, à se figer ou à se défendre. C’est un mécanisme de protection ancestral, profondément enraciné dans notre système nerveux.
Mais lorsque l’environnement n’a pas permis d’expérimenter cette peur dans un cadre sécurisant — par exemple dans une famille insécurisante, violente ou imprévisible —, ce système d’alerte peut rester suractivé. La peur devient alors omniprésente, elle colore le quotidien, s’infiltre dans les choix, empêche le relâchement. À l’inverse, elle peut aussi être totalement évacuée, remplacée par des stratégies de contrôle, de détachement ou de repli. Le corps apprend à se couper de l’alerte pour ne plus avoir à ressentir le danger.
En Gestalt-thérapie, la peur est envisagée comme un moment clé du cycle de contact. Elle surgit souvent à l’approche d’une nouveauté : un changement, une rencontre, une prise de parole, un engagement. Si elle n’est pas reconnue ou accueillie, elle peut bloquer l’élan vers l’autre, figer le mouvement spontané du contact. Elle signale bien souvent un besoin de sécurité, de repères, de prévisibilité. Lorsque la peur devient chronique, elle entrave l’ajustement créateur. Elle enferme dans des comportements d’évitement, de sur-adaptation ou de retrait, et prive de la possibilité d’expérimenter, d’oser, de transformer la relation à soi et au monde.
En thérapie, apprivoiser la peur pour redevenir acteur·rice
En séance, la peur se manifeste souvent de manière subtile, sous forme de tensions diffuses. On la retrouve dans les hésitations, les blocages, les crispations corporelles ou encore dans des réponses toutes faites, presque mécaniques. Elle peut aussi surgir de façon plus directe, face à une question inattendue, un silence chargé, ou un moment d’intimité. Dans ces instants, la peur devient un point d’entrée précieux pour le travail thérapeutique.
Explorer la peur en Gestalt, c’est d’abord s’autoriser à ressentir ce qui se passe dans le corps, à reconnaître les endroits où elle s’installe, où elle se contracte. C’est aussi prendre le temps d’identifier les pensées qui l’accompagnent, de nommer ce qui est perçu comme une menace, et de faire le lien avec des expériences antérieures qui ont pu laisser des empreintes émotionnelles durables. Mais plus encore, c’est offrir un cadre suffisamment sécurisant pour que cette peur puisse exister, sans être niée ni jugée. C’est dans cet espace de présence et de respect que peut naître une première sensation de sécurité : le sentiment que le danger n’est peut-être plus là, que d’autres ajustements deviennent possibles, que l’on peut retrouver un pouvoir d’action.
Ce travail prend tout son sens dans le cadre d’une thérapie en visio, qui offre parfois une première porte d’entrée aux personnes très anxieuses. Être dans un lieu familier, chez soi, peut permettre de commencer un accompagnement tout en douceur, avant d’éventuellement envisager des séances en présence, une fois un certain niveau de sécurité intérieure retrouvé.
Une émotion à reconnaître pour mieux s'en libérer
Quand la peur peut circuler, elle cesse d'être un frein. Elle devient une boussole, une forme de lucidité sur ce qui est possible et ce qui ne l'est pas. Elle invite à la prudence, mais aussi à l'audace - celle de vérifier si le danger est encore là, ou si une autre expérience peut advenir.
Dans le prochain article de cette série, nous explorerons une émotion souvent diabolisée mais tout aussi essentielle : la colère, qui parle de nos limites, de notre besoin de respect et de notre force intérieure.
Pour aller plus loin
Vous pouvez maintenant lire ou relire les autres articles de la série sur les émotions primaires :
- À quoi servent nos émotions ?
- Joie : comment accueillir ce que la vie nous offre vraiment ?
- Tristesse : ce qui nous quitte et ce que cela révèle
- Peur : comment en faire une alliée de notre sécurité intérieure
- Colère : comment l'exprimer sans exploser ni s'éteindre
- Surprise : accueillir l'inattendu pour se réinventer
- Dégoût : comprendre ce signal de préservation intérieure
Si vous ressentez le besoin d'explorer ce que vos émotions expriment - dans votre quotidien, votre couple, ou dans un moment de transition de vie - la Gestalt-thérapie peut vous offrir un espace d'exploration et de transformation. Que ce soit en thérapie Gestalt individuelle à Vitry-sur-Seine ou en thérapie gestalt individuelle à proximité de Villejuif, je vous propose un accompagnement personnalisé si les émotions prennent trop de place ou trop peu dans la relation.