Quand on détourne l’attention pour ne pas être touché
La déflexion est une interruption du contact subtile, parfois presque invisible. Elle consiste à détourner l’attention - par l’humour, la légèreté, la rationalisation ou le bavardage - pour éviter la rencontre directe avec l’autre ou avec soi-même. C’est ce moment où l’on parle de tout sauf de ce qui compte, où l’on rit quand l’émotion monte, où l’on change de sujet pour ne pas sentir.
En Gestalt-thérapie, la déflexion n’est pas une faute : c’est une protection fine et intelligente, souvent mise en place très tôt pour éviter d’être blessé. Mais à force d’éviter le contact, on finit par s’éloigner de soi.
Les racines de la déflexion
La déflexion s’installe quand le contact est perçu comme menaçant : trop intense, trop intime, trop risqué. L’enfant apprend à détourner l’attention pour se protéger de l’intrusion, de la critique ou du jugement. À l’âge adulte, ce réflexe reste actif : on désamorce les émotions par une plaisanterie, on parle beaucoup pour éviter le silence, on observe au lieu de ressentir.
Ce mécanisme se situe souvent entre la phase de sensation et la prise de conscience du cycle du contact : il agit avant même que l’émotion n’émerge pleinement, comme un bouclier invisible.
En séance : repérer l’évitement subtil
En Gestalt-thérapie en visio, la déflexion se repère parfois dans un sourire nerveux, une phrase anodine ou un regard fuyant. Le thérapeute ne cherche pas à "forcer" le contact, mais à l’inviter doucement. Il peut dire : "Je remarque que vous souriez en me parlant de quelque chose de difficile. Que se passe-t-il en vous ?"
Ce type d’intervention vise à ramener la personne à l’expérience du moment présent, à ce qui se passe dans le corps, dans le souffle, dans la relation. Peu à peu, la déflexion devient visible, consciente, et peut se transformer en un choix : "Est-ce que je veux encore éviter ou puis-je rester un instant avec ce que je ressens ?".
Les effets dans la relation
La déflexion crée une distance subtile : la relation semble fluide, mais reste en surface. Les échanges sont agréables, polis, parfois même drôles - mais le lien manque de profondeur. Ce mécanisme protège, mais isole.
A Chevilly-Larue, en Gestalt-thérapie individuelle, ce travail autour de la déflexion permet souvent de retrouver le goût du contact authentique, là où l’humour ou la légèreté servaient autrefois à masquer une peur du rejet ou de la douleur. En séances en visio, cette approche s’adapte aussi à celles et ceux qui préfèrent explorer ces mécanismes depuis un cadre plus intime.
La déflexion et les autres interruptions
La déflexion fonctionne souvent en tandem avec d’autres mécanismes : Elle peut succéder à la rétroflexion, lorsque l’énergie est déjà contenue et ne trouve pas de voie d’expression. Elle prépare parfois le terrain à la confluence, quand la frontière entre soi et l’autre s’efface pour éviter la tension du contact.
En reconnaissant ces mouvements, le travail Gestalt aide à ramener de la présence dans la relation : être là, sentir, accueillir, même ce qui dérange.
Conclusion
La déflexion est une danse d’évitement : un art délicat de ne pas se laisser atteindre. Mais derrière cette danse, il y à souvent une immense sensibilité. Apprendre à repérer ses déflexions, c’est réapprendre à rester en lien, à se laisser toucher, sans se perdre ni se blinder.
En Gestalt, c’est dans ces micro-moments - un regard tenu, une respiration partagée - que le contact reprend vie.